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13 janvier 2006

la salsa, un cocktail contre la morosité

On ne peut que vous conseiller de lire l'article de Sabine Grandadam dans Courrier International : "la salsa, un cocktail contre la morosité" !

Cet article répond et relativise avec élégance celui du journaliste portoricain Hector Feliciano, intitulé "à la cubaine ou à la portoricaine, la dernière salsa à Paris", publié dans "Etiqueta Negra" (Lima) et traduit dans le numéro du 12 Janvier de Courrier International.

La salsa, un cocktail contre la morosité

Des milliers de Français sont fans de salsa. Avec leurs manies techniques qui agacent les Latinos, bien sûr, mais aussi avec un formidable appétit de vivre et de partager...


Rationaliser, codifier et faire passer à la moulinette de l'intellect toute nouvelle mode ou tendance n'est pas le moindre des travers français. Le journaliste et écrivain portoricain Héctor Feliciano, qui a testé les soirées parisiennes des aficionados de la salsa , a bien raison de fustiger leur approche par trop académique, qui compromet l'esprit festif de cette danse.

Il a parfaitement saisi l'absurde conflit larvé entre deux styles de salsa, portoricain et cubain,, une ligne de partage imaginaire qui alimente les discussions du principal forum français, , et finit par étouffer la spontanéité de la danse, séparant en deux "filières professionnelles", pourrait-on dire, des individus pourtant unis par une même passion de la salsa. Enfin, Héctor Feliciano pointe avec humour la prétention de ces Français qui, sur les pistes, jaugent d'un œil sévère ceux qui osent s'écarter des conventions dans leur façon de danser.


Comme les Latinos, qui n'ont cure de danser pour exercer leur technique, mais dansent par pur plaisir. En témoigne cette réflexion entendue à La Coupole, haut lieu de la salsa parisienne, un soir d'affluence : "Il n'y a pas de danseurs ce soir, il n'y a que des Latinos !" A trop chercher la performance, l'effet spectacle, "les gens acquièrent de plus en plus de technique, mais perdent leur âme en dansant", regrette Valérie Mitchelson elle-même, pourtant cofondatrice (haïtienne) de la plus courue des écoles de salsa de Paris, Salsabor.

Alors, la salsa parisienne n'est-elle que la coquille vide de la culture afro-caribéenne dont elle est issue ? Comme bien des vérités, celle-ci n'est que partielle. La salsa à Paris reste d'abord l'antidote le plus vivifiant qui soit à la morosité, cet autre travers reproché aux Français. Et c'est par ce biais qu'elle sera encore longtemps à la mode. A en juger par le renouvellement continu des danseurs, toutes générations confondues, la salsa ne laisse pas de transporter les Français. Des Français de toutes les couleurs, de toutes les origines, contrairement à ce qu'a cru constater Héctor Feliciano : la salsa en France est un des rares vecteurs de brassage social et ethnique dans le pays. Elle aide les gens à s'extraire de la raideur et à gagner en convivialité, en sourires. Elle crée de la joie, de la bonne humeur, suscite des idées désopilantes et applaudies (y compris des spectateurs improvisés), comme de danser en plein air sur le parvis du Palais-Royal, à l'heure du déjeuner, ou sur le béton de La Défense. En résumé, l'esprit salsa cher à Héctor Feliciano existe aussi à Paris et à Marseille, Rennes ou Monptellier.

Bien sûr, dans la salsa à la française, la technique, le savoir-faire peuvent être des faire-valoir. Mais cette rigueur du geste que s'imposent les danseurs ne sert pas qu'à briller sur les pistes ; elle rassure et permet aux partenaires de cueillir le moment d'intensité, de pur bonheur, à l'instar du duende dans le flamenco. A défaut de savoir danser comme si l'on était "né là-bas", on apprend. Le naturel, le langage corporel peuvent ensuite prendre place, sans doute dans un processus inverse à celui des Latinos ou des Caribéens, qui ont dansé dès leurs premiers pas sous des latitudes plus permissives quant à l'expression corporelle…

Le côté laborieux est bien un avatar de nombre de salseros français, mais les choses évoluent. Longtemps, les danseurs de salsa ne se sont guère souciés d'être en symbiose avec la musique, qui offre pourtant une riche palette de rythmes complexes et syncopés à interpréter par la danse. "Depuis deux ans, l'aspect culturel et musical des danses latines suscite davantage de curiosité", observe Jean-Paul Tamayo, musicien franco-colombien et producteur d'événements. "On s'intéresse plus aux instruments, à leur origine, à leur influence sur le mouvement et la chorégraphie."
Abanico, une école de musique, forme à Paris de plus en plus d'amateurs venus de la danse vers la musique. Des musiciens professionnels sans grands moyens réussissent malgré tout à se produire en concert ou en album, à l'instar des groupes Ocho y Media ou Mambomania. De la communauté "latino" immigrée en Europe ont émergé des talents qui renouvellent le genre, comme Orlando Poleo (vénézuélien) ou, bien sûr, Yuri Buenaventura (colombien).

Dans les écoles de danse, des sessions en live de percussions accompagnent les danseurs, des cours d'écoute musicale se sont imposés. Des danses latines traditionnelles, antérieures à la salsa, comme le són, le bolero, le cha-cha-cha, la rumba, ouvrent d'autres horizons, finalement très appréciés des salseros français, qui y découvrent le métissage de la culture "latino".

Evidemment, le reggaeton conquiert aussi Paris : tant mieux. Mais la salsa n'est pas morte pour autant. Elle demeure le ciment d'une communauté très souvent addictive qui a généré le terme de "salsaholic". Alors,
a bailar !

Sabine Grandadam

Courier International, 17 Janvier 2006

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